RDC : L'Échec et Mat de Vital Kamerhe – La Démission qui Secoue l'Union Sacrée et Ouvre la Course au Perchoir

Par notre correspondant politique, Kinshasa.


Le 22 septembre 2025 restera une date marquante dans le paysage politique congolais. Ce jour-là, Vital Kamerhe (VK), poids lourd de la majorité et Président de l'Assemblée nationale, a jeté l'éponge, démissionnant de son poste avant même le vote de destitution qui se préparait contre lui.

Officiellement, l'homme d'État invoque le souci de permettre à l'institution de se concentrer "pleinement aux questions essentielles de la vie nationale," notamment l'urgence sécuritaire dans l'Est.[1, 2] Mais derrière ce discours d'apaisement, la démission de Kamerhe est la conséquence d'une intense "guerre de positionnement" et d'un "règlement de comptes interne" orchestré par la faction présidentielle.[3] L'enjeu est colossal : verrouiller l'institution législative à moins de deux ans des élections cruciales de 2028.

La Chute d'un Allié Encombrant

Vital Kamerhe, l'allié historique du Président Félix Tshisekedi (FT) depuis le pacte de Nairobi en 2018 [4], était devenu la cible d'une puissante pétition initiée par un député de la majorité, Crispin Mbindule.[5]

Les accusations officielles portaient sur une gestion administrative et financière opaque de l'Assemblée nationale, l'entrave au contrôle parlementaire, et même la réduction des crédits, ce qui aurait bloqué l'augmentation des émoluments des députés.[6, 3]

Toutefois, la menace était avant tout politique. La pétition a recueilli 262 signatures de députés, dépassant largement le seuil requis de 250 pour une destitution.[7, 8] Face à cette certitude d'être "chassé" par sa propre majorité, VK a choisi de partir par la "grande porte" pour s'épargner l'humiliation d'un vote.[5, 9]

Pour les observateurs, la véritable raison est ailleurs : on reprochait à Kamerhe un "manque d'alignement sur les priorités du pouvoir".[3] Ayant des ambitions présidentielles assumées pour 2028, il était perçu comme un potentiel contre-pouvoir, capable de bloquer des initiatives chères à l'Exécutif, notamment d'éventuelles réformes constitutionnelles.[3] Sa neutralisation préventive assure à l'UDPS (parti présidentiel) la mainmise sur les institutions clés avant le prochain cycle électoral.[7, 1] Cette démission est largement perçue comme un "règlement de comptes interne à l'Union sacrée, visant à consolider le contrôle de l'UDPS sur l'institution".[7, 3]

La Bataille pour le Perchoir : L'UDPS et les Revenants

La démission de Vital Kamerhe ouvre immédiatement la course à la présidence de la chambre basse. Ce poste est considéré comme stratégique pour l'Union Sacrée de la Nation (USN) afin de garantir la fluidité de l'agenda législatif. L'USN doit désormais désigner un candidat unique, un processus délicat au vu des ambitions de ses composantes.[10]

Le parti présidentiel, l'UDPS, est le grand favori, ayant lorgné sur ce poste depuis longtemps, se prévalant d'être la plus grande formation de l'Assemblée.[11] La désignation d'un loyaliste inconditionnel est attendue pour sceller le contrôle du pouvoir exécutif sur le législatif.

Cependant, cette course fait revenir sur le devant de la scène d'autres figures de la majorité :

  • L'UDPS cherche à imposer un de ses cadres.
  • Les alliés majeurs (comme le MLC ou la FDC) pourraient tenter de récupérer le poste pour maintenir un semblant d'équilibre au sein de la coalition.[10]
  • Christophe Mboso N'Kodia Pwanga, l'ancien président de l'Assemblée nationale qui avait précédé Kamerhe, est également cité dans les rivalités, cherchant lui aussi à reprendre la direction du perchoir qu'il avait perdu.[7, 6]

La rapidité avec laquelle le Président Tshisekedi et le Présidium de l'USN vont arbitrer ce choix sera un indicateur crucial de la stabilité future de la coalition et de la direction qu'elle entend prendre jusqu'en 2028 .

Quel Avenir pour Vital Kamerhe?

Si Félix Tshisekedi a tenu à affirmer qu'il continuait de considérer Kamerhe comme un « allié, un frère, » sauf si ce dernier décidait de s'en éloigner , le jeu politique a changé pour le démissionnaire.

Vital Kamerhe a choisi de rester au sein de la majorité [12], mais il a perdu la protection institutionnelle du perchoir, le rendant potentiellement plus vulnérable à de futures manœuvres judiciaires. Son repositionnement tactique vise clairement l'échéance de 2028. VK est déjà considéré par les analystes comme un potentiel "adversaire politique" du Président Tshisekedi pour la prochaine présidentielle.[12, 11]

Pour l'heure, l'Assemblée nationale est sommée de "débloquer" son agenda.[1, 13] Des lois cruciales attendent d'être traitées, notamment la prorogation de l'état de siège dans l'Est du pays , ainsi que la loi-cadre sur l'enseignement national.[5] La crise Kamerhe a souligné que, malgré l'urgence nationale, la priorité du pouvoir reste la consolidation de son contrôle politique. La RDC entame ainsi une phase de turbulences où la loyauté sera la monnaie d'échange la plus précieuse.

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